Le Jeudi 24 mars (cliquez ici) un groupe de randonneurs Arcaliens de Colmar a été reçu par le Maire de Zimmerbach qui leur a offert un fort sympathique pot de l'amitié, au cours duquel Monsieur J.C. MAURER, adjoint au Maire, a conté l'histoire de l'abbé Paul Vuillemin.
Suite à ma demande, Monsieur Maurer a eu la gentillesse de m'envoyer par mail le résumé de ce passionnant récit que j'ai le plaisir de partager avec les lecteurs de ce billet.
"" Bonjour,
C’est avec du retard que je vous envoie l’histoire de l’abbé Paul Vuillemin.
Monsieur André GSELL qui a été « locataire » dans la cave du presbytère a écrit un livre ou il raconte son passage à Zimmerbach.
La référence du livre est : RESCAPE aux Editions Oberlin.
Bonne réception
Jean Claude Maurer ""
Paul VUILLEMIN
"" Paul Vuillemin est né le 4 juin 1913 à Rouffach. Ses études secondaires commencées au petit séminaire de Zillisheim, ont été continuées au Collège Lamartine à Belley, dans le département de l’Ain. En 1935, suivant son désir de devenir prêtre, il entre au grand séminaire de Belley. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il est mobilisé en tant que militaire français, et est ordonné prêtre le 2 mai 1940. Pendant la campagne de France il est affecté dans une unité combattante dans les Ardennes. Il s’est beaucoup investi sur les champs de bataille en tant qu’infirmier en portant les premiers secours aux blessés ; son activité a été remarquée et il a été décoré de la croix de guerre avec étoile d’argent. Fait prisonnier par l’armée allemande en 1940 au moment de la débâcle française, il réussit à s’évader et à s’enfuir en direction des Vosges.
En 1941, il est nommé « administrateur » de la cure de Zimmerbach, et s’installe au presbytère de cette commune (l’actuelle mairie). Profondément croyant et patriote français, il refuse le fait accompli : l’occupation de l’Alsace par les troupes allemandes, son annexion de fait au IIIe Reich, et la dictature nationale-socialiste. De toutes ses forces, aidé en cela par sa vive intelligence et sa ruse, il va résister aux autorités nazies. Il accueille des centaines de prisonniers évadés, joue le rôle de passeur en les aidant à franchir la crête vosgienne alors frontière entre le Reich et la France, ce qui leur permet de retrouver la liberté ; et surtout il cache dans une cave secrète spécialement aménagée à cet effet, des réfractaires à l’incorporation de force dans l’armée allemande, décrétée par le Gauleiter Robert Wagner le 25 août 1942. Il devient ainsi le chef de la résistance de la vallée de Munster, aidé en cela par un réseau très efficace de personnes discrètes qui travaillent dans l’ombre.
Le 18 juin 1944, lors d’un pèlerinage à la Bruderkapelle, qu’il transforma en véritable manifestation anti-nazie, il a été arrêté par les autorités allemandes avec l’évêque missionnaire Ernest Hauger qui était présent. Mais ils ont été relâchés peu de temps plus tard, faute de preuves. La quête du jour a été confisquée par la Gestapo. Une des phrases qui avait marqué les fidèles présents lors de son sermon en langue allemande a été : « Nous n’avons qu’un Führer, c’est Jésus-Christ ».
Vers la fin de l’année 1944, trente-deux personnes (dont l’abbé lui-même) habitaient de manière « visible » ou « invisible » le presbytère.
Dénoncé, l’abbé Vuillemin est arrêté le 31 janvier 1945 à proximité du presbytère par la Geheime Feldgendarmerie, deux jours avant l’entrée des Libérateurs dans Colmar, et cinq avant la libération de la vallée de Munster !
Il est d’abord emmené à la Ortskommandatur de Zimmerbach puis transféré dans les bâtiments de l’Hôpital psychiatrique de Rouffach, utilisés comme prison. Il y est torturé par les agents de la Gestapo. Puis pendant dix-sept heures, il est interrogé sans relâche par le Kriminalsekretär Darmstaetter et ses collègues, qui l’obligent à faire 500 génuflexions. Epuisé, il tombe par terre, et il reçoit encore une volée de coups de gourdin sur la tête, ce qui a pour conséquence une grave commotion cérébrale, dont il va souffrir le restant de sa vie. A aucun moment, il n’a dit mot sur ses activités de résistant.
L’abbé Paul Vuillemin est condamné à mort. Mais, la veille du jour prévu pour son exécution, les Allemands capturent un espion américain qui aurait eu des contacts avec lui. Un nouveau dossier est instruit contre lui, avec comme chef d’accusation l’espionnage. Entre temps, Colmar est libérée et les Allemands doivent précipitamment quitter l’Alsace. Les prisonniers sont transférés en Allemagne, et l’abbé Vuillemin passe d’un camp de concentration à l’autre. Les actes du procès, et surtout celui de sa condamnation à mort, sont heureusement restés en Alsace. Il réussit à se faire passer pour « politisch verdächtig », politiquement peu sûr. Il parvient à s’échapper du camp dans lequel il était enfermé et se cache à Dorfmettingen, dans le Württemberg, jusqu’à l’arrivée des soldats alliés. En mai 1945, il est de retour à Zimmerbach.
En novembre 1945, il est décoré de la Légion d’Honneur et de la Croix de Guerre avec palme.
Le 16 octobre 1946, il quitte Zimmerbach pour l’Autriche, où il est nommé aumônier militaire titulaire des troupes alpines d’occupation au Zillerthal.
Le 3 octobre 1952 il est radié de la liste des aumôniers militaires et est nommé un an plus tard, sur sa demande, curé de Billiat, Génissiat et Injoux, puis en 1961 curé de Mijoux et Lelex, dans le diocèse de Belley.
Sa santé avait été mise à rude épreuve pendant la guerre, et il ne s’est pas ménagé ensuite. Il meurt le 18 septembre 1967 ; et est enterré, conformément à sa volonté, au cimetière de Belley. ""
Je suis très reconnaissante à Monsieur Maurer de nous dévoiler cette passionnante histoire et je l'en remercie.