C'est Jean MASSON, directeur de recherche - Président du Centre INRA de Colmar qui a tenu la conférence sur le thème "Vigne OGM", à renfort de diapos et sur un ton passionné.
Tout d'abord qu'est ce qu'un OGM ? Notre ami Arcalien, Charles PUTZ, prédécesseur de Jean MASSON à l'INRA, , nous éclaire.
"Organisme génétiquement manipulé". Pas compliqué ! mais lorsqu'on sonde les français, 83 % ne veulent pas d'OGM et 75 % des sondés ne savent pas ce qu'est un OGM. curieux non ?
- "Aucun danger de manger des OGM" , nous dit Charles qui se veut rassurant. "Notre système digestif coupe les ADN en petits morceaux anéantis durant la digestion par le suc gastrique".
Simpliste ? mais non :
La molécule d'ADN est découpée en très petits moreaux qui sont appelés chromosomes. Le gène est un petit morceau de la molécule d'ADN. Dans un chromosome il y a un fil de 1 m 50 d'ADN....
Nota : Charles cite un critique de science, Jacques TESTART. Le lien vers son site est
ici
Monsieur Jean MASSON intervient. Il nous parle des recherches portant sur le court-noué, une maladie virale présente dans la quasi-totalité des régions viticoles du monde où elle provoque la mort des vignes et rend les terres impropres à la viticulture.
La première expérimentation d'utilisation des OGM pour lutter contre la maladie court-noué débuta en 1994. En 1999 afin de contrer une attaque menée par José Bové, l'INRA a elle-même arraché ses vignes expérimentales. En septembre 2009 destruction des essais de culture OGM.
En août 2010, des années de recherche sur les vignes transgéniques ont été à nouveau anéanties par des faucheurs volontaires-écolo-intégristes.
Interview après le fauchage de vignes expérimentales, Olivier Lemaire, chercheur à l'INRA :
"Nous sommes en colère et très déçus. Les OGM arriveront un jour ou l’autre en France, il faut que nous ayons les connaissances pour les refuser ou les accepter. Les gens qui ont fauché se sont tiré une balle dans le pied car nous étions prêts à répondre point par point à leurs interrogations. Aujourd’hui, les plantes sont définitivement perdues mais il nous reste le sol dans lequel on a le virus et la microflore, ce qui nous permettra de continuer à travailler sur l’impact environnemental des OGM. Mais quand bien même nous continuerions, ce serait dans quelles conditions? Serait-ce pour que des extrémistes reviennent labourer ce champ? Il faut arrêter les amalgames, les OGM sont une technologie à réfléchir au cas par cas, et surtout il faut dialoguer. La violence n’a jamais élevé le débat, et s’attaquer ainsi au travail d’autrui est d’une violence extrême: ce matériel vivant a été haché menu par des outils tranchants, la vigne a été coupée en tous petits morceaux, elle saignait littéralement et mourait. Nous sommes avant tout des biologistes qui aiment le vivant, et c’était douloureux pour nous."
"On connaît la maladie depuis une soixantaine d’années et on a exploré plusieurs stratégies. On a notamment recherché des gènes de résistance naturelle au virus et on a utilisé la prémunition, qui est une forme de vaccination. Le problème, c’est que nous ne travaillons pas avec un seul virus, mais avec un mélange de variants viraux qui rendent la prémunition inefficace à terme. Nous nous sommes donc orientés vers la transgénèse. Celle pratiquée à Colmar s’apparente à de la thérapie génique.
On ne modifie génétiquement que la racine de la vigne, appelée porte-greffes, pour qu’elle s’oppose au virus qui vient du sol. Le greffon, toute la partie aérienne qui produit le raisin, n’est pas transgénique. Le greffon n’est pas contaminé par le porte-greffe transgénique: on a suivi ces risques et les résultats se sont avérés négatifs. Quant aux risques de contamination des cultures environnantes par les fuites de pollen, on s’est engagé à éliminer toutes les inflorescences, qui de toute façon étaient sur la partie non OGM de la vigne."
Le député Eric Straumann dit :
""Je rejoins mon collègue sénateur vert, Jacques Muller, qui a exprimé en septembre 2009 sa "grande amertume" après la précédente destruction des essais de cultures OGM, en dénonçant "le coup d’arrêt donné à cette expérimentation extraordinaire sur le plan de la démarche et de la déontologie [qui] est un gâchis incommensurable sur le plan humain".
Le 15/08/2010 l'Express publie un
article
Après la conférence, les questions fusent et Jean MASSON ne manque pas de répondre aux Arcaliens oenologues qui s'intéressent à tous les problèmes viticoles.
Un grand Bravo à Jean MASSON pour son courage après toutes ces épreuves et aussi un grand merci pour sa conférence !
Le débat a été suivi d'un pot de l'amitié qui nous a permis de goûter quelques vins fins et naturels de l'INRA de Colmar , vins sélectionnés par Grégory LEMARQUIS, caviste de l'INRA,
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Le "Kniperlé" appelé aussi "Ortlieber" ;
Le knipperlé est un cépage de cuve alsacien. Il fut largement multiplié à la fin du
XVIIIe siècle grâce au travail du pépiniériste Johann Michael Ortlieb, qui l'importait en 1756 à Riquewihr. Il est en voie de disparition.
- Un Riesling "Osterberg" - grand cru - 2009
- Un Riesling Osterberg "bio" - 2009
Les deux Riesling proviennent de la même parcelle (dont une moitié traitée "bio" et l'autre moitié normale)
- Un pinot gris 2009 (Wintzenheim) - 12°5 - peut se servir avec une cuisine exotique
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le tout accompagné de toasts et de kougelopf.
C'est grâce à Jean-Paul et à son épouse Yvonne que nous avons passé ce moment fort à l'INRA de Colmar. Merci à vous deux !